Paris. Conférence de presse du 5.10.2024 d’une poignée de lanceurs d’alerte pour protester contre la
tenue, à quelques encablures de là, du Sommet de la Francophonie et dénoncer la politique linguistique irresponsable de ses dirigeants.
À cette occasion, billet de Philippe Carron sur la débâcle du français en Suisse romande
Mesdames, Messieurs les journalistes,
Votre langue, notre langue est indiscutablement la langue à abattre partout en Francophonie européenne, le mot « abattre » n’étant pas trop fort pour qualifier le massacre en cours, pire encore, la substitution pure et simple d’un idiome qui aura été un monument et un phare dans l’histoire de l’Humanité.
Vous ne connaissez pas forcément la réalité linguistique suisse romande telle qu’elle est vue, vécue et sentie par quelques rares lanceurs d’alerte malgré les détracteurs qui s’imaginent encore que l’anglomanie ambiante n’est qu’un effet de mode en Pays romand, ou mieux encore, une vue de l’esprit alors que, pour un esprit sensé, il s’agit bien évidemment d’une réalité qui glace les sangs où que le regard se tourne au quotidien. La majorité des locuteurs romands, apparemment par honte ou par détestation de soi et, de plus, confondant ouverture à l’autre avec l’asservissement le plus complet, deviennent à la fois complices et acteurs d’une effroyable pollution langagière…pour, à terme, se saborder et s’autodétruire.
En ce moment, un vaste processus d’américanisation sévit d’un bout à l’autre du spectre sociétal romand… et de la Suisse toute entière. La Confédération est devenue en un rien de temps « un État de non-droit linguistique en dépit d’une Constitution où le plurilinguisme est inscrit dans la loi sur les langues. Seulement, ces dispositions législatives ainsi que les nombreuses ordonnances successives censées garantir le respect et la protection de tous les groupes linguistiques sont jetées aux orties à l’instar de la loi Toubon dans l’Hexagone, les Registres de commerce cantonaux achevant le travail de sape de l’anglo-américain. Il faut dire que le degré de servilité de nos dirigeants vis-à-vis des Anglo-Saxons est à son paroxysme et que, même si certains voulaient ruer dans les brancards, ils seraient vite rappelés à l’ordre par les milieux économico-financiers anglomanes qui ont pignon sur toutes les avenues…
Cependant, cette évolution à contre-courant a des conséquences très graves et pénalisantes pour l’ensemble du monde francophone. En effet, la situation gravissime actuelle a des répercussions dépassant largement les frontières de la Romandie, et ce
1) en dissuadant les étrangers de retour chez eux d’apprendre le français et de lui accorder une place dans l’espace public, car jugé inutile à travers l’attitude observée des Suisses romands à son égard.
2) en poussant les francophones une fois chez eux (touristes, étudiants, hommes d’affaires…) à se détourner du français, à le « détruire », puisque qu’il en est ainsi dans cette Suisse romande apparemment moderne et dynamique
3) en menaçant clairement le statut mondial de la langue française, au plus grand désavantage de l’ensemble des peuples francophones du monde, dont les Suisses francophones eux-mêmes.
En guise de conclusion, nous demandons à la France ainsi qu’aux autres communautés de langue maternelle française de se ressaisir et d’agir dans le cadre d’une véritable coopération et solidarité, qui ne fut approchée que dans la grande époque 1958-1974.
Philippe Carron, Paris, 5 octobre 2024