Ancrage juridique des langues en Suisse

En Suisse, le plurilinguisme est inscrit dans la loi sur les langues, loi qui est censée garantir la liberté de la langue dans tous les domaines de l'activité de l’État et veiller à son application, ce qui devrait garantir le respect de tous les groupes linguistiques. Or, ceci n’est que de la poudre aux yeux vu que les politiques ont les pieds et les mains liés par les milieux économico-financiers du tout-anglais qui ont pignon sur toutes les avenues, cette clique de la pub et du fric, comme la nomme à juste titre Michel Serres… et les pauvres citoyens les dindons d’une farce « anglomaniaque » qui a d’ores et déjà pris et envahi les consciences.     

     Et pourtant… 
L’art. 4 de la Constitution suisse définit les langues nationales ; l’art. 18 garantit la liberté de la langue et l’article 70 définit les langues officielles de la Confédération. S'y ajoutent toutes les nouvelles dispositions « prétendument » en faveur du patrimoine linguistique et culturel adoptées régulièrement. Modifications qui, cependant, masquent une cruelle réalité à faire rire le premier Martien venu, alors qu’une seule langue, prédatrice et étrangère de surcroît, est en train de grignoter du terrain au point elle va supplanter toutes les autres officielles par l’absence de puissants et contraignants garde-fous, tels ceux appliqués avec raison au Québec avec la loi 101 récemment renforcée.   

 L'anglicisation de notre langue n'est que la pointe de l'iceberg (prononcé iceberg et non aïceberg). Le degré de servilité de nos dirigeants vis-à-vis des Anglo-Saxons pue. L'état de servitude de la société romande, belge et française est affligeant !   

Résultat de ce gâchis annoncé 
En dépit de toutes les nombreuses ordonnances sur les langues (OLang) et les Instructions concernant le plurilinguisme… et surtout grâce à des Registres du commerce assassins, c’est de plus en plus une Suisse, a fortiori romande, américanisée qui offre aux mondes une image déplorable et détestable de nation colonisée dans tout son spectre sociétal quoique l’on chante aux monde ses vertus qui appartiennent à des temps révolus : la fameuse cohésion sociale et la non moins fameuse paix des langues.   

Et en Romandie ? 
L’article relatif à la protection de la langue française qui stipule que la langue du canton est le français est pourtant scellé dans le marbre de chaque Constitution cantonale de Suisse romande. Cette disposition législative pourrait facilement servir de premier garde-fou et de contre-argument aux « enfumeurs » de tout poil qui prétendent, avec cette mauvaise foi de bonimenteurs décomplexés, qu’elle n’a aucune valeur juridique. Elle est bafouée et foulée aux pieds à l’instar de la loi Toubon en France. Ne se porte-t-elle pourtant pas garante, et ce noir sur blanc, de la langue de leurs administrés ? Ne stipule-t-elle pas que le français en est la seule et unique langue quoi qu’en disent ces gens peu recommandables et malveillants qui crachent sur le patrimoine culturel dans lequel ils ont baigné… et qui ont l’audace de clamer à l’envi que sans l’anglo-américain vous n’êtes qu’un paria, un éternel demeuré sans espoir de retour, un dégénéré à mettre au ban de la société ?       


Vous avez dit cohésion sociale et paix des langues ? 

-> La cohésion sociale n’existe plus dans ce pays, sinon les différentes parties de la Confédération s’entendraient pour lutter contre un envahisseur en prenant résolument des mesures concrètes et fortes. Le contrat social est rompu car la politique de casse et de classe en cours s’apparente plus à celle d’un régime totalitaire et dictatorial qu’à un régime démocratique. En fait, tout est fait, dans l’Helvétie de ce début de siècle, pour passer sous silence – une réelle omertà – les véritables projets d’usurpation langagière, a fortiori culturelle et civilisationnelle, d’une nébuleuse qui a pris possession des esprits à l’instar de métastases dans un gros corps infecté, que l’on nomme désormais SWITZERLAND.   

->  La paix des langues n'existent  plus en Suisse, non plus, plutôt une guerre sordide menée ouvertement par les « baroudeurs » du tout-anglais dans une indifférence consternante, la population romande, quant à elle, dorénavant décomplexée du « syndrome » du parfait colonisé, vivant apparemment très bien sa nouvelle condition.   


    Le billet du président au sujet de ce fatras de dispositions linguistiques mensongères


Nous vivons à l’ère de la table rase où toute initiative en matière linguistique – songeons à l’écriture « prétendument » inclusive - vient se greffer sur un socle d’immoralité dans une société helvétique éminemment immorale - comme partout ailleurs, d'ailleurs -, société où seuls ont valeur de dogmes un consumérisme débridé, la course effrénée à la compétition dans tous les domaines, une pollution mentale qui induit une pollution environnementale effrayante, la poursuite frénétique de tout ce qui peut vous engraisser pécuniairement, bref la société du détricotage de tout ce qui, auparavant, donnait encore du sens aux activités humaines. Dans le domaine culturel, la langue française surtout - les autres langues nationales dans une moindre mesure – paie un lourd tribut à cet état d’esprit iconoclaste, elle qui doit sentir l’hérésie aux yeux des tenants de la doxa anglo-américaine. D’ailleurs, Churchill, en son temps, avait prôné, dans son sordide discours à Harvard en 1943, l’hégémonie de la puissance anglo-saxonne, hégémonie qui, selon lui, devait se faire, non plus par les armes, mais par des moyens autrement plus subtils, tels ceux de la culture anglo-saxonne, de la propagande étatique, du matraquage mental et de l’asservissement intellectuel, ce qui se vérifie où que l’on se tourne aujourd’hui. 

Dès lors, le British Council, avec ces mêmes arguments d’hégémonie planétaire, n’avait plus qu’à lui emboîter le pas un peu plus tard… Et signifier aux marchands retors de tous horizons que l’anglo-américain avait dorénavant la voie libre et devait régner en maître sur les cinq continents, la langue française étant la première cible à abattre vu son génie et son aura qui en jetaient trop, langue qui pouvait faire capoter leurs sinistres projets de razzia culturelle planétaire. 

Il n’est par conséquent guère étonnant si tout est fait, dans « le pré carré » politique de nos deux chambres fédérales à Berne, où la plupart des élus sont indifférents à la disparition d’un immense fait multiculturel, pour faire taire toute velléité de modifier une Constitution renégate laquelle a oublié les fondements même de son existence, sa raison d’être. Cette même Constitution n’a plus rien de constitutif pour les langues qu’elle était censée défendre bec et ongles, le pays ayant basculé dans l’État de non-droit linguistique avec toutes les conséquences désastreuses que cela comporte pour des citoyens qui ne savent d’ailleurs plus à quelle bouée langagière s’agripper, un peuple que frappe une illettrisme monstrueux favorisé par la montée en puissance d’un anglo-américain qui aurait dû être mis sur le même plan que le tamoul ou le turc. 

L’hypocrisie pompeusement étalée dans toute la littérature qui a trait à la protection et à la promotion des langues officielles en Suisse n’est qu’un leurre, un ramassis de mensonges savamment entretenus par une propagande anglo-américaine bien orchestrée et un formatage de cerveaux qui ont pénétré les consciences des preneurs de décisions, ces derniers, enfonçant le clou de la supercherie, ont réussi à prendre en otage tout le système parlementaire de gens qui n’ont plus qu’à s’y plier, tourner casaque ou à démissionner. Dès lors, la masse entière de la population helvétique subit en toute inconscience les mots d’ordre venus d’en haut, ou plutôt, confondant ouverture à l’autre avec le plus lâche aplatissement, se jette dans les griffes de prédateurs culturels qui lui arrachent pourtant et son identité et son légitime droit de vivre ses singularités langagières, a fortiori civilisationnelles.   


Le français, première langue nationale avec une envergure internationale, non ? 

Pour arrêter ce massacre de langues, recouvrer et son contrat social et sa cohésion sociale, la Suisse doit à tout prix remettre la langue française, langue internationale, au premier rang dans le cadre de ses échanges internationaux et lui rendre son statut à tous les niveaux de l’enseignement, balayant ainsi l’anglais et assigner ce dernier à son rang de subalterne, au même titre que le tamoul, le swahéli ou le turc. Quant aux liens qui prévalaient naguère et qui tissaient la trame des relations entre les différentes régions linguistiques, ils doivent à nouveau renaître dans ce pays, chaque groupe linguistique faisant l’effort de s’ouvrir à l’autre culture pour favoriser et harmonie et bon « vivre ensemble ». En ce qui me concerne, je l’ai compris très tôt dans la vie en m’intéressant à la langue et à la singularité de l’autre, chose qui ne demande pas un si grand investissement. 

Philippe Carron  
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